Le Québec vient de perdre un grand intellectuel, comme il s’en fait peu.

L’Amérique latine, aussi, tout comme la Caraïbe, l’Afrique

et l’ensemble des « damné-e-s de la terre »

à qui André Corten a dédié sa vie de chercheur de terrain et

de penseur politique.

La pensée critique vient de perdre un monstre sacré

Corten a toujours été un monstre,

dans le sens que lui donne son ami Antonio Negri,

parlant de la multitude,

c’est-à-dire un phénomène hors normes,

un « géant emblématique des figures extrêmes

de la liberté et de l’invention ».

Corten a toujours été au-delà de toute position convenue.

Depuis son expulsion de l’Université catholique de Louvain

(pour avoir remis en question la violence institutionnelle du mode

de notation des étudiant-e-s),

jusqu’à ses réflexions sur l’hospitalité

et les populations déplacées,

en passant par l’État nourricier,

le romantisme théologique du pentecôtisme,

l’alchimie politique du miracle,

l’expression politique de la souffrance,

la langue politique,

l’interpellation plébéienne

Corten a toujours innové, en cherchant à rester critique,

même, et même surtout, des positions « critiques » fétichisées

aidant à découvrir de nouvelles choses

que les « savoirs » eux-mêmes empêchent de connaître.

Comme l’imaginaire, tel que défini par Castoriadis,

Corten était capable de voir dans les choses

d’autres choses que ce qu’elles « sont »

ou paraissent « être »

C’est ce qui rend ce monstre « sacré ».

Mais un « sacré immanent », comme il disait,

en parlant de l’autonomie ou de la capacité d’autoreprésentation

des « pauvres » ou des laissé-e-s pour compte

Souhaitons que cette posture plébéienne « sacrée »

s’immanentise dans chaque insoumis,

suivant son exemple, ou pas.

¡Hasta siempre! Compañero Corten

Ricardo Peñafiel

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